• Laurence Rieben : Lecture : 30 années de recul sur la recherche... (15 décembre 2007)

    Laurence Rieben, Anne-Marie Chartier

    Dans les années 80, praticiens et chercheurs divergent. Fouchambert et Charmeux sont le modèle dominant chez les formateurs. « Pourtant, on sait depuis 80 que l’influence du contexte est faible chez les bons lecteurs en 4e année de curriculum, que l’identification de tous les mots est très importante, que la conscience phonologique est positivement corrélée avec l’apprentissage de la lecture ».

     

    Page de Laurence Rieben sur le blog.

     

    source : 

    http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/primaire/elementaire/Pages/2007/88_elem_lect_rieben.aspx

     

    Laurence Rieben, FASPE, Genève

    Dans les années 80, praticiens et chercheurs divergent. Fouchambert et Charmeux sont le modèle dominant chez les formateurs. « Pourtant, on sait depuis 80 que l’influence du contexte est faible chez les bons lecteurs en 4e année de curriculum, que l’identification de tous les mots est très importante, que la conscience phonologique est positivement corrélée avec l’apprentissage de la lecture ».

    Dès cette époque, L. Rieben sent qu’il faut essayer de faire connaître ces recherches (publication de l’apprenti lecteur en 1989), et aider les enseignants à travailler à la fois sur le sens et le code, y compris dans des situations complexes, en refusant de jeter le bébé avec l’eau du bain : les acquis positifs de Charmeux et Foucambert). C’est ainsi qu’elle adapte, dans l’école avec qui elle travaille, une démarche inspirée des pratiques d’une enseignante française, Christiane Clesse. Le « texte de référence » est une séquence en plusieurs phases : expression orale et hypothèses à partir de l’album illustré, puis lecture par l’enseignante, élaboration du «texte écrit de référence» (dictée collective à l’adulte de l’histoire revue par la classe, y compris en intégrant les informations des images), dessin individuel d’un épisode, puis écriture du commentaire du dessin à partir d’outils (texte de référence, listes…).

    Mais de cette époque, elle se souvient que les enseignantes sont encore très réservées sur le passage précoce à l’écriture...


    Dans les années 90, les deux secteurs se rapprochent : ce qu’on peut lire chez les chercheurs se rapproche des pratiques pédagogiques : « les dogmatismes tombent, on peut s’intéresser au décodage dans être accusé de revenir en arrière » écrit Gombert. On différencie l’adulte lecteur et l’apprenant, on réfléchit sur la place de la langue orale, on s’intéresse aux situations réelles de classe, aux relations entre lecture et écriture : doit-on d’abord apprendre à lire pour écrire, ou au contraire les deux apprentissages sont-ils concommitants ? « Nous avons mieux mesuré que la production d’écrit permettait à l’enfant de réaliser que l’écrit code l’oral, mais aussi de prendre conscience de la segmentation, ou de motiver l’apprentissage par la production ».


    Mais on commence aussi à travailler sur les différences interindividuelles : au-delà des moyennes, l’écart entre les performances des élèves devient sujet de réflexion,  certains élèves qui ne progressant que très marginalement au cours de leur cycle d’apprentissage… « On s’est intéressé aux différentes « manières de faire » des élèves en train d’apprendre à écrire les mots en s’appuyant sur un texte de référence : copie aveugle, localisation dans le titre ou dans le texte, indices grapho-phonémiques, copies voulues. Ce sont autant d’étapes dans un cheminement évolutif au cours du temps. »


    Mais qu’est-ce qu’une méthode ?
    Début 2000, on commence à disposer de méta-analyses permettant de comparer les résultats des différentes méthodes, ou de mieux savoir ce que les élèves comprennent réellement… « On a montré, essentiellement dans les études anglophones, l’effet positif de l’enseignement de la conscience phonémique (ou phonique) sur la lecture, l’orthographe et la compréhension. Mais les récentes études randomisées (dans lesquelles on tire au sort les classes sans tenir compte du volontariat ou de l’engagement de l’enseignant) ont cependant montré qu’il y avait pas d’effet de supériorité des méthodes phoniques sur la compréhension, ni d’écart significatif entre les méthodes phoniques synthétiques et les méthodes phoniques analytiques… »
    Pour la chercheuse suisse, un champ est donc encore à défricher… ne serait-ce que pour définir exactement ce que sont les « méthodes », au-delà des oppositions binaires qui ne veulent rien dire.« C’est à dire en regardant toutes les composantes de ce qui se passe dans les classes sous l’angle de plusieurs dimensions : relation oral/écrit, sens du traitement de l’information (analyse/syntaxe), poids qu’on done au travail sur les graphèmes, situations didactiques (exercices/complexes), relation lecture/écriture… Bref, développer des modèles d’ensemble et non des composantes isolées… »
    Pour elle, c’est la nature du système d’écriture devrait être au coeur du débat sur l’enseignement de la lecture: « l’enfant doit apprendre comment le système d’écriture de sa langue fonctionne, comment on passe de l’oral à l’écrit, et inversement. Et les spécificités de la langue françaises sont telles qu’on ne peut pas se contenter de traduire les études anglo-saxonnes. Toutes ces orientations nécessitent une augmentation massive des crédits de la recherche, la mise au point de programmes internationaux francophones, la participation institutionnellement admise des enseignants à la recherche… Tout un programme… »

    salle 

    Sur le site du Café
     
    Par ppicard3 , le samedi 15 décembre 2007.
    « Sylvie Cèbe (avec Roland Goigoux, auteur de Catégo, Phono, Lector, Lectorino, etc.)Laurence Rieben (psychologie cognitive lecture) »